Simone de Beauvoir
Agir donc, il le faut, et les occasions ne manquent pas. Il semblait qu'après la victoire alliée on pourrait refaire une société plus juste, mais il y a les comptes d'après-guerre qui se règlent, les places qu'on se dispute, les idéologies qui divergent, tout le brouillamini politique aboutissant à l'affaire d'Indochine, la guerre d'Algérie ou la naissance de la Ve République et, hors de France, à l'écrasement de la Hongrie ou la révolution cubaine pour ne citer que quelques exemples. Entremêlés à l'action politique, il y a les voyages, les travaux de l'écrivain : près de vingt ans d'un passé proche pleinement vécu par une femme qui a su tenir les promesses de sa jeunesse. À trop se décanter, le passé perd cette intensité qui nous l'a fait vivre le cour battant et qui donne aux souvenirs leur saveur humaine à défaut de la froide impartialité historique. C'est pourquoi, au risque d'encourir le reproche de manquer du recul nécessaire, Simone de Beauvoir a choisi de continuer dans « La Force des choses » l'autobiographie entreprise dans « Mémoires d'une jeune fille rangée » et « La Force de l'âge ». Vie publique, vie privée se confondent au cours des années qui succèdent au grand élan