Chère E,
Je suppose que tu as dû voir aux informations l’accident du camion qui transportait du concentré d’herbicide. Et bien, j’y suis passée en voiture avec Maman pour aller chez le coiffeur. C’est bien pire que ce qu’ils montrent à la télévision. Je ne sais pas si tu es au courant, mais le conducteur du camion est toujours à l’hôpital, et d’après les journaux il essayait d’éviter une biche qui traversait la route, et il a perdu le contrôle du camion. Le camion s’est renversé, et tout le concentré d’herbicide qu’il contenait s’est déversé dans la vallée. Quand j’y suis passée, le produit avait déjà tout détruit, les fleurs, l’herbe et toutes formes de vie animales et végétales semblaient fanées, anéanties. C’était terrifiant, comme si cette vallée n’avait jamais vu la lumière du jour. L’herbe et les branches basses étaient rongées. On pouvait distinguer le sillon de l’herbicide, car une trace plus sombre était visible, mais il était tellement puissant que tout était détruit à au moins 5 mètres de cette trace. Les arbres et le haut des buissons étaient toujours verts, c’était la seule marque de vie présente. Les oiseaux ne chantaient même plus. De plus, il pleuvait, et le sol était tout boueux. C’était vraiment une vision désolante de la nature. Je me rappelle de cette vallée quand nous allions faire des promenades, et jamais je n’aurais imaginé qu’elle soit dans un état si déplorable un jour. Malgré mon rendez-vous chez le coiffeur, j’ai demandé à Maman de s’arrêter pour aller demander aux autorités ce qu’ils comptaient faire. Ils nous répondirent que personne ne pouvait entrer dans la zone contaminée parce qu’elle était balisée, que des équipes spécialisées allaient essayer de faire de leur mieux pour désinfecter la zone, et ils nous annoncèrent que le concentré avait atteint le ruisseau qui coulait en bas de la vallée. Tous les poissons, et autres animaux aquatiques qui vivaient dans ce ruisseau sont morts. J’essayais alors de plisser les yeux pour tenter