Si le mal est perçu comme source de volupté, c’est que sa possibilité octroie un sentiment de plaisir, et promet d’accéder à l’état du bonheur. La tentation du mal est d’autant plus puissante, qu’elle engendre une sensation de plaisir. En atteste le réflexe, commenté d’ailleurs par Bergson, dans Le Rire, et qui consiste à rire méchamment d’un être humain qui tombe subitement. Jean Jacques Rousseau, analysant le comportement du « méchant », rend compte de ce penchant : « sans la satire amère, sans la raillerie insultante, il serait toujours triste ; le ris moqueur est son seul plaisir ». Si le « méchant » chez Rousseau ne trouve le plaisir que dans la méchanceté, Thérèse, dans Les âmes fortes, accorde au plaisir le privilège de succéder à la réussite : « Si elle a fait quelque détour (…) c’était pour mieux réussir. D’abord. Et ensuite pour faire durer le plaisir». Chez Shakespeare, Macbeth perpètre le régicide pour avoir « le cercle d’or », mais cynique et déterminé, après les premières hésitations, il exprime ouvertement l’idée de ne tuer que pour le plaisir. S’adressant au meurtriers qu’il a recrutés pour liquider Banquo, il le dit ouvertement: « Et bien que je puisse à visage découvert le balayer hors / de ma vue, exerçant là mon bon plaisir…» Il est donc clair que l’un des ressorts du mal est bien le plaisir, qui octroie un sentiment de supériorité sur les autres, frôlant même la démesure.
Par ailleurs, le mal crée chez l’homme l’illusion de pouvoir accéder au bonheur facilement, en empruntant la voie la plus courte. Telle est la raison qui fait de la criminalité le principal défi qu’affrontent les nations vainement depuis toujours. Lady Macbeth considère que la seule condition pour l’aisance, liée évidemment à la réussite, est de s’adonner au mal. « Psychanalysant », dans le fameux monologue, son époux, elle perce les limites de son agir: « Mais je crains ta nature, trop pleine du lait de la tendresse humaine (…) tu