Rire pour critiquer les gens
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«Pour critiquer les gens, il faut les connaître, et pour les connaître, il faut les aimer.» C'est une phrase de moraliste. Et les moralistes sont éternels. Chez Coluche, l'outrance dévoilait une dialectique. L'absurde accouchait d'une logique imparable. Et sous l'insulte couvait la compassion. Il se gaussait des beaufs tout en les aimant. Son humour les considérait, les rédimait. C'était lui-même un beauf transcendantal. Il sanibroyait les hommes politiques mais il croyait à la politique. Sa candidature à la présidentielle de 1981 ne relève pas que du bras d'honneur et son programme ne manque pas d'air (3) : liberté de parole et de fumette, relance de la consommation, diminution des charges, augmentation du traitement des fonctionnaires et des politiques afin d'endiguer la corruption, étatisation de la Sécu, désarmement de la police, démilitarisation du pays (qui serait placé sous protectorat américain), adaptation des normes techniques pour faciliter le commerce avec les Etats-Unis. Il y en a pour tout le monde, des communistes aux libéraux en passant par les songe-creux, mais c'était aussi une façon de dire, au début des années 80, que le clivage droite-gauche était déjà impotent, obsolète, régressif. Crédité de 10 à 16% des intentions de vote, soutenu par des intellectuels, menaçant la présence de Mitterrand au second tour et menacé lui-même de mort, encouragé puis censuré par les médias, Coluche finira par se retirer de la course, non sans lâcher ce que déjà beaucoup voulaient entendre : «J'ai voulu remuer la merde politique dans laquelle on est, je n'en supporte plus l'odeur.»
Un comique, que l'on peut ne pas trouver drôle, annonce aujourd'hui son intention de se présenter à l'Elysée en 2007, après avoir été candidat sur la liste Euro-Palestine aux européennes. Dieudonné obtiendra peut-être ses 500 signatures. Mais si l'on compare son discours et ses cibles à ceux de Coluche, on constatera que l'angle s'est sévèrement refermé. Dieudonné défend des communautés