Rimbaud- l'étoile a pleuré rose.
L’étoile à pleure rose au cœur de tes oreilles
L’infini roulé blanc de ta nuque à tes reins
Mammes vermeilles
Et l’homme saigné noir à ton flanc souverain
L'étoile a pleuré rose... est un poème sans titre, un quatrain isolé. Nous le connaissons par un document de la main de Verlaine, où ce dernier avait copié L'étoile a pleuré rose... juste après le sonnet des Voyelles. Cette proximité a alimenté les commentaires, mais elle peut s'expliquer par des raisons assez simples : les deux poèmes sont sans doute de dates voisines, et tous deux fondés sur une "étude" de couleurs. L'étoile a pleuré rose... peut se définir comme une "célébration critique" du culte de Vénus : les trois premiers vers blasonnent le corps superbe de la Femme, le quatrième opère une inversion de perspective où le lecteur rimbaldien reconnaîtra une thématique voisine de celle des Petites amoureuses et des Sœurs de charité. On pourrait donc se demander s’il s’agit bien d’un "blason" ? Les quatre compléments circonstanciels occupant le deuxième hémistiche énumèrent (approximativement de haut en bas, selon une logique descriptive caractéristique du genre du "blason") des parties du corps féminin : les "oreilles", le dos (de ta "nuque" à tes "reins"), les seins ("mammes" est un néologisme, synonyme élégant de "mamelles", tiré du latin "mamma"), le "flanc". Si l'on excepte le vers 4, le groupe sujet-verbe-attribut qui occupe le premier hémistiche de chaque alexandrin adopte le ton de l'éloge. La première preuve de cette inspiration "blasonnante" réside dans la dimension cosmique du poème. Car, en effet, il s’agirait surtout d’un blason spirituel qui évoquerait la naissance de Vénus. "L'étoile", "l'infini", "la mer", ne sont pas des personnages de la vie quotidienne; ce sont des acteurs symboliques de la scène cosmique. La femme chantée par le poème n'est manifestement pas l'élue du rimailleur qui exerce sa lyre mais "La Femme", dont le