Poèmes
PAUCA MEÆ
I.
Pure Innocence ! Vertu sainte !
Ô les deux sommets d’ici-bas !
Où croissent, sans ombre et sans crainte,
Les deux palmes des deux combats !
Palme du combat Ignorance !
Palme du combat Vérité !
L’âme, à travers sa transparence,
Voit trembler leur double clarté.
Innocence ! Vertu ! sublimes
Même pour l’œil mort du méchant !
On voit dans l’azur ces deux cimes,
L’une au levant, l’autre au couchant.
Elles guident la nef qui sombre ;
L’une est phare, et l’autre est flambeau ;
L’une a le berceau dans son ombre,
L’autre en son ombre a le tombeau.
C’est sous la terre infortunée
Que commence, obscure à nos yeux,
La ligne de la destinée ;
Elles l’achèvent dans les cieux.
Elles montrent, malgré les voiles
Et l’ombre du fatal milieu,
Nos âmes touchant les étoiles
Et la candeur mêlée au bleu.
Elles éclairent les problèmes ;
Elles disent le lendemain ;
Elles sont les blancheurs suprêmes
De tout le sombre gouffre humain.
L’archange effleure de son aile
Ce faîte où Jéhovah s’assied ;
Et sur cette neige éternelle
On voit l’empreinte d’un seul pied.
Cette trace qui nous enseigne,
Ce pied blanc, ce pied fait de jour,
Ce pied rose, hélas ! car il saigne,
Ce pied nu, c’est le tien, amour !
Janvier 1843.
II.
15 février 1843
Aime celui qui t’aime, et sois heureuse en lui.
– Adieu ! – sois son trésor, ô toi qui fus le nôtre !
Va, mon enfant béni, d’une famille à l’autre.
Emporte le bonheur et laisse-nous l’ennui !
Ici, l’on te retient ; là-bas, on te désire.
Fille, épouse, ange, enfant, fais ton double devoir.
Donne-nous un regret, donne-leur un espoir,
Sors avec une larme ! entre avec un sourire !
Dans l’église, 15 février 1843.
4 septembre