Philosophie
En effet, voir une chose, c’est la limiter en tant que chose. Si je perçois la couleur des yeux d’une personne, cela signifie que j’isole mentalement ses yeux de son visage et que je qualifie la nuance chromatique de l’iris. Je porte une attention purement plastique à son visage, je détaille ses qualités exactement comme fait une esthéticienne lorsque elle se porte vers la forme des pommettes, des lèvres, travaille les contours des yeux avec du mascara. Elle travaille le visage comme matière. Mais si on réfléchit un peu, on réalise qu’elle ne peut pas faire ça sans se détacher d’un rapport premier qui est celui que nous percevons tous d’abord quand nous regardons un visage et qui consiste dans le fait qu’il est une source continue d’expression. Il exprime un sens avant d’être comme ceci ou comme cela. Avant de voir « ce qu’il est », nous sommes « portés » par l’émergence première de sa capacité d’expression. Je ne vois pas un visage comme un objet dont je peux dire tout de suite ce que c’est, le ranger dans une classification. Les appréciations sur ses caractéristiques se produisent toujours dans un second temps. Un visage nous imprime toujours d’abord le flux d’une certaine