Philo
Publication n° 875 du 6 mars 2008
« C’est un travail d’acceptation de soi »
Entretien avec Tristan Dupuy, éducateur spécialisé en internat depuis 2001 à l’institut Plein Vent de Saint-Etienne
Comment avez-vous découvert votre surdité ?
Je suis né entendant. Mais à la suite d’une série d’otites mal soignées, j’ai commencé à perdre progressivement une grande partie de mon audition. J’ai été appareillé vers huit ans. Je me croyais seul et j’ignorais l’existence des instituts spécialisés et des aides qui pouvaient exister. Je me suis retrouvé isolé dans ma classe, je n’avais pas conscience que mes difficultés à suivre la scolarité venait de ma surdité. J’ai redoublé ma 4ème et après une brève incursion en classe de seconde, j’ai finalement intégré un BEP installateur conseil en équipement du foyer. Là, j’ai eu la chance d’être orienté vers une classe expérimentale de seulement dix élèves. Les enseignants ont pu alors prendre en compte mon handicap, c’est ainsi que j’ai poursuivi jusqu’au bac pro. Mais à la sortie de l’école, je me suis très rapidement rendu compte que je ne pouvais pas travailler dans ce secteur d’activité : accueillir le client, répondre au téléphone.
Quelle a été votre orientation à la suite de ce premier échec professionnel ?
Compte tenu de mon précédent parcours, j’ai souhaité devenir éducateur spécialisé pour les sourds et malentendants. J’ai d’abord trouvé un CES (Contrat emploi solidarité) à mi-temps de candidat élève éducateur à Saint-Laurent-en-Royans, dans la Drôme, ce qui m’a permis de préparer les concours pour rejoindre une école qui préparait à ce métier. A l’époque, seuls deux instituts, à Paris et Montpellier, assuraient une année sur deux un enseignement doublé par un traducteur en langue des signes. Dès que j’ai commencé cette formation, les choses ont radicalement changé. Pour la première fois, j’avais vraiment du plaisir à suivre les cours. Je n’étais plus dans l’effort permanent et je pouvais