Otto dix
© SESAM, Paris, 1998. La mort
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98 - Otto Dix
En 1920, lors de la première foire internationale à Berlin, Dix exposa Kriegsversehrte (mit Selbstbildnis) (Infirmes de guerre) (avec autoportrait), frise de "gueules cassées" dans une rue, amputés, défigurés, aveugles. La rue de Prague et Die Skatspieler (Les Joueurs de skat), toutes deux de 1920, sont proches de cette oeuvre d'autant plus emblématique qu'elle fut saisie par les nazis en 1933 et probablement détruite. On y voit des hommes diminués, porteurs de prothèses mécaniques, des cicatrices hideuses, des greffes, un monde grotesque d'anciens combattants pour les uns réduits à mendier, les autres exhibant leurs blessures comme autant de preuves de leur bravoure guerrière. Dans La rue de Prague, leurs infirmités se trouvent accentuées par la proximité d'une femme en robe rose moulante et d'un chien. La vitrine contient des perruques, des corsets et des prothèses. Une main de bois tient une canne. La peinture oscille entre une précision neutre et des déformations satiriques. Elle n'est pas exempte non plus d'allusions politiques. Près du cul-de-jatte au buste monté sur une planche à roulettes, Dix a collé un tract ou une affichette, qui porte en titre Juden raus ! - Dehors les Juifs. Les ligues d'anciens combattants étaient en effet très sensibles à la propagande ultra-nationaliste, dont l'antisémitisme fut une des composantes très tôt, avant que le nazisme n'en fasse l'un de ses dogmes. Aussi peut-on voir dans l'oeuvre, tout à la fois, une analyse de la société allemande de la défaite et une préfiguration de ce qu'elle devint dans