Le merveilleux est partout dans l’œuvre d’Homère. Les dieux se mêlent sans cesse à l’action. Certains héros, comme Achille et le troyen Enée, ont pour mère des déesses. Beaucoup d’autres sont en relation directe et constante avec quelque divinité qui les conseille, les encourage, leur donne la victoire ou assure leur retraite. Les évènements humains sont gouvernés par les dieux, qui parfois même, prenant une forme humaine, descendent en personne des hauteurs de l’Olympe dans la plaine de Troie pour prendre part à la mêlée. Aphrodite, un jour, est ainsi blessée par Diomède, et rentre en gémissant dans le palais des dieux. Ou Athéna ramassant la javeline d’Achille aux pieds prompts qu’il venait de lancer sur Hector, et la lui redonnant afin qu’il puisse continuer le combat : « Balançant la javeline dont l’ombre s’allonge, il la lança devant lui. L’illustre Hector, faisant face, la vit et l’évita. Il avait vu le coup d’avance et s’était baissé. La javeline de bronze vola par-dessus lui et se planta dans le sol. Pallas Athéna la saisit, l’enleva et la redonna à Achille, sans qu’Hector, le pasteur d’hommes, s’en aperçut. » (Iliade, XXII, 264-307)
Quand Voltaire écrivit la Henriade, il crut devoir, lui aussi, pour obéir aux prétendues règles de l’épopée, introduire dans son poème quelques apparitions surnaturelles. Mais ce n’était là qu’un artifice, et les artifices de ce genre se révèlent toujours par un certain désaccord avec le ton général de l’œuvre.
Dans Homère, au contraire, le merveilleux est sincère et naïf. Le poète mêle sans cesse les dieux aux évènements de son poème, parce que les hommes de son temps concevaient ainsi le rôle de la divinité. L’imagination des grecs du IXème siècle leur faisait voir dans les phénomènes de la nature des forces divines en action. Zeus (Jupiter) tonnait en haut de l’Olympe ; Poséidon (Neptune) ébranlait la mer et la calmait tour à tour ; Phébus [épithète d’Apollon signifiant « pur » ou « lumineux »] éclairait le monde ; les