Méditation grisâtre de jules laforgue
Traditionnellement les poète lyriques expriment leurs états d'âme à travers l'évocation de la nature. Ainsi, dans un sonnet de jeunesse datant de 1880, "Méditation grisâtre", le poète symboliste Jules Laforgue trace un paysage marin, en proie à une formidable tempête, au sein duquel il semble seul et perdu. .Cette tempête symboliserait-elle donc les sentiments intimes du poète? C'est ce que nous allons étudier au cours de cette étude , en observant tout d'abord la façon dont Jules Laforgue met en place les éléments de ce paysage tourmenté et en examinant dans un deuxième temps en quoi celui-ci traduit, dans un registre lyrique, les émotions et les sentiments du poète. Dés le premier quatrain , en effet, le poète crée un univers maritime où il est "assis sur un ilot" face à l'"Océan blême". Le champ lexical de l'eau est d'ailleurs omniprésent, que ce soit l'eau de la "mer"v9 avec les termes "noyé"v1,"le flot"v3 , "vagues"v6, ou l'eau du ciel, eau plus ou moins dense qui va de la pluie au brouillard: "pluvieux"v1,"brumes"v1," brouillard" v9.Les allitérations en [l]et en[ r] dans tout le poème renforcent cette ambiance liquide. La grisaille domine dans ce paysage, avec les " brumes sales"v1, le " brouillard" et le "ciel gris"v9, l'Océan lui même étant qualifié de "blême"v2. Cette grisaille et cette eau omniprésentes aboutissent à une confusion des éléments où toute distinction est abolie "partout le grand ciel gris, le brouillard et la mer"v9. "L 'Océan est sans borne, sans borne"v13 avec cette répétition qui accentue la sensation d'infini.et se confond avec "l'horizon lointain". Le temps lui même semble aboli puisqu'il "n'aura jamais ...jamais de fin"v1. Ce paysage non seulement prive donc le poète de tout repère , hormis l'îlot où il se trouve, mais il est aussi en proie à la colère hyperbolique des éléments: les rafales "mourantes"hurlent"v4,la tourmente est "brutale"v8, les vents sont