Les villessont ellesles dernières frontières?
Les très grandes villes, celles que Braudel qualifie de « villes monde », sont à bien des égards l'ultime frontière. En effet, sur le plan économique, ce sont elles qui concentrent les activités les plus importantes : c'est à Londres, New York, Paris, Shanghai que se concentrent les sièges des firmes multinationales qui prennent des décisions transcendant sans aucun doute les frontières étatiques. De même que c'est là que l'on fabrique une nouvelle culture, détachée des réalités nationales compte tenu du brassage qui s'y opère : on peut prendre l'exemple de la Chine ou celui des États-Unis. Sur le plan social, il n'y a que dans les très grandes villes que l'on peut se fondre et espérer grimper l'échelle sociale par le biais des fonctions tertiaires supérieures (universités) qu'elles seules concentrent. Dans ces lieux interchangeables tout est fluide et rien ne vous contraint.
Pourtant c'est aussi dans ces villes que s'érigent les plus fortes barrières. La ségrégation spatiale et sociale y est particulièrement forte. Pour les migrants qui passent de ville en ville (du village à la petite ville, de la petite ville à la vie moyenne, de la ville moyenne à la très grande ville, ultime frontière de leur migration en Inde) pas question d'avoir accès au centre-ville, les derniers arrivants se concentrent dans les bidonvilles et les favelas au Brésil et n'ont pas accès au centre névralgique, là où vivent ceux que Reich appelle les manipulateurs de symboles : ces gens, qui ont un niveau d'éducation extrêmement élevé, vivent entre eux, dans des espaces qui leur sont propres, souvent