Les fenêtres -baudelaire.
2 Par delà des vagues de toits, j'aperçois une femme mûre, ridée déjà, pauvre, toujours penchée sur quelque chose, et qui ne sort jamais. Avec son visage, avec son vêtement, avec presque rien, j'ai refait l'histoire de cette femme, ou plutôt sa légende, et quelquefois je me la raconte à moi-même en pleurant.
3 Si c'eût été un pauvre vieux homme, j'aurais refait la sienne tout aussi aisément.
4 Et je me couche, fier d'avoir vécu et souffert dans d'autres que moi-même.
5 Peut-être me direz-vous : « Es-tu sûr que cette légende soit la vraie ? » Qu'importe ce que peut être la réalité placée hors de moi, si elle m'a aidé à vivre, à sentir que je suis et ce que je suis ? Grammaire du texte.
La première partie du poème, qui correspond au premier paragraphe, est marquée par la reprise d'un élément du titre : le nom fenêtre. Ce nom est répété trois fois avec le déterminant une ; puis il est repris par un terme associé (« une vitre ») et par la métaphore « ce trou noir ou lumineux », ces deux reprises se trouvant en progression linéaire. L'idée de fenêtre, objet donnant accès à l'imagination, n'est plus nommée par la suite. Ce sont plutôt les verbes dénotant le regard, qui apparaissent dans la zone du thème, qui feront le lien entre ce paragraphe et les autres. La première phrase en contient trois : « Celui qui regarde [...] ne voit jamais autant [...] que celui qui regarde [...] » ; le verbe voir est repris dans le groupe sujet de la troisième phrase (« Ce qu'on peut voir... ») ; ces deux verbes sont ensuite relayés par un