les dieux selon epicure
Dans sa Lettre à Ménécée, Epicure énonce quatre remèdes destinés à favoriser l’absence de trouble chez chacun d’entre nous, et dont le premier est le suivant : « Les dieux ne sont pas à craindre […] ». Epicure n’est pas athée. Il nous dit simplement que les dieux ne s’occupent pas des affaires humaines. Ainsi, il s’évite toute impasse métaphysique en écartant toute hypothèse quant à l’existence ou non de Dieu. En outre, sa proposition est un contrepoids face à l’instrumentalisation politique que peut être l’usage de la religion, et plus particulièrement de la superstition. Dire que les dieux nous surveillent, que la foudre est de leur fait pour punir tous ceux contrevenant à l’ordre établi, est une façon d’asservir les hommes. Le premier conseil épicurien ouvre une voie libératrice contre la théocratie autoritaire. Epicure oppose ainsi la politique au mythe. Certes, la mythologie est un mode d’explication du réel. Mais Epicure lui préfère la physique, soit de connaître les causes naturelles de chaque phénomène. Avec Epicure, les dieux n’ayant plus voix au chapitre, c’est le monde qui devient silencieux. Ce silence peut être effrayant pour certains, comme cela l’est pour Lucrèce, son disciple. L’homme est dorénavant seul avec lui-même. Avec Epicure, plus question de se tourner vers un autre que l’homme, ou se retourner contre ce même autre. L’homme est à la fois responsable de tout et seul quant à établir une réponse sur la question de son existence, mais aussi et surtout à propos de ce qui l’attend une fois la mort venue. Pascal, comme Lucrèce, manifestera bien plus tard son inquiétude, voire son angoisse devant le « silence éternel des espaces infinis ». Pour Lucrèce et Pascal, l’indifférence des dieux est une absence. Pour Epicure, elle est bien plus une opportunité.