Les bons chiens - baudelaire
360 mots
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Les bons chiens permettent à Baudelaire de construire une figure du poète qui se place en marge des normes esthétiques dictées par la société des arts. Arrière la muse académique! Je n'ai que faire de cette vieille bégueule. J'invoque la muse familière, la citadine, la vivante, pour qu'elle m'aide à chanter les bons chiens. Il adopte la posture d’une liberté marginale, en rupture avec une servilité confortable à l’égard des hiérarchies académiques. Dans L’albatros, la comparaison est rendue explicite dans le dernier tercet Le poète est semblable au prince des nuées Ici la figure du poète concilie les deux aspects, noble et misérable : à la fois roi de l’azur et comique laid gauche veule On retrouve la figure dressée dans Bénédiction, celle du poète issu du ciel et exilé sur une terre hostile : il s’agit de la vision manichéenne qui oppose grandeur et chute, spiritualité et matérialité, sur un plan moral, symbolique et syntaxique, le poète réalisant la tension douloureuse entre ces deux pôles.
Dans le dernier poème en prose du Spleen de Paris («Les bons chiens»), Baudelaire entonne l'éloge paradoxal, non de l'homme raisonnable et de ses exploits, mais des chiens crottés qui trottinent sur les trottoirs des villes dans l'indifférence du public, des chiens perdus abandonnés de leur maître («Je chante le chien crotté, le chien pauvre, le chien sans domicile, le chien flâneur, le chien saltimbanque, le chien dont l'instinct, comme celui du pauvre, du bohémien et de l'histrion, est merveilleusement aiguillonné par la nécessité, cette si bonne mère, cette vraie patronne des intelligences!», 307). Image dérisoire sans doute du poète qui se meurt dans la solitude de la grande ville, mais plus encore manifeste pour un nouvel art poétique qui entend faire naître la beauté des ordures qui jonchent le trottoir des cités modernes : «Arrière la muse académique! Je n'ai que faire de cette vieille bégueule. J'invoque la muse familière, la citadine, la vivante, pour qu'elle