Le thème de la mort Lucrèce et Sénèque
Textes III : LE THEME DE LA MORT CHEZ LES AUTEURS LATINS
LUCRECE (Ier siècle av. J.C) et SENEQUE (Ier siècle ap.J.C.)
A. LUCRECE, De la Nature, livre III :
La mort n’ est donc rien pour nous et ne nous touche en rien, puisque la substance de l’âme apparaît comme mortelle. Et de même que, dans la passé, nous n’avons point senti de douleur quand pour nous combattre on vit de toutes parts se ruer les Carthaginois, quand le monde, secoué tout entier par le choc effroyable de la guerre, frissonna d’épouvante sous la haute voûte du ciel, et que tous les humains se demandèrent anxieux auquel des deux peuples devait échoir l’empire et sur la terre et sur la mer : de même, quand nous cesserons d’être, après le divorce du coprs et de l’âme dont l’union compose notre individu, nous pouvons être sûrs qu’à ce moment où nous ne serons plus, rien absolument ne pourra plus atteindre ni émouvoir nos sens, même si la terre vient à se confondre avec la mer, et la mer avec le ciel. A supposer même que, après leur départ du corps, l’esprit et l’âme conservent le sentiment, il n’y a pourtant là rien qui nous touche, nous qui n’existons que par l’union de l’âme et du corps dont l’assemblage constitue notre individu. Et même, si rassemblant toute notre matière, le temps, après notre mort, la remettait dans l’ordre où elle est rangée maintenant, et que de nouveau nous fût donnée la lumière de la vie, nous ne serions néanmoins nullement touchés par un tel événement, puisqu’il y aurait eu rupture dans la chaîne de nos souvenirs(...) Ainsi, quand tu vois un homme se lamenter sur lui-même à la pensée qu’après la mort il pourrira, une fois son corps abandonné, ou qu’il sera dévoré par les flammes ou par la mâchoire des bêtes sauvages, tu peux dire que sa voix sonne faux, et que se cache dans son coeur quelque aiguillon secret, malgré son refus affecté de croire qu’aucun sentiment puisse subsister en lui dans la mort ; A mon avis, il