Le ghetto français
Éric Maurin poursuit la réflexion sur la montée et l'origine des inégalités. La thèse de l’ouvrage : la société française est parcourue de dualismes en tous sens. Dans cette société, la réussite sociale est déterminée très en amont et la circulation ascendante ex-post est difficile. En conséquence, les individus et leurs parents se lancent très tôt dans une quête anxieuse des facteurs d’élection sociale : les dynamiques ségrégatives parcourent donc l’ensemble de la société et ne sont pas cantonnées à quelques riches qui cherchent à se protéger et à quelques exclus qui se trouvent relégués.
L’auteur en conclut qu’il faut s’attaquer non pas aux conséquences de la ségrégation mais à ses causes. Il invite à une action massive à la racine du problème, soit à une répartition plus égale de la réussite scolaire qui limitera l’importance du lieu de résidence dans la course à la réussite sociale par la voie scolaire. Il invite également à revoir les conditions d’attribution des allocations logements pour inciter aux parcours résidentiels.
Si son analyse est intéressante, les solutions qu’il propose sont dans l’ensemble partielles, peu novatrices et font l’impasse sur la gestion de court terme des formidables inégalités territoriales qu’il a par ailleurs mis à jour.
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1. Le constat
Alors que les tendances à la ségrégation animent la société depuis plus d’une décennie, les enquêtes sociologiques à l’échelle communale concluent à un maintien envers et contre tout de la mixité. Travaillant sur des grappes de 20 à 30 logements, c’est-à-dire à un niveau territorial très fin (un immeuble ou deux, un lotissement), Eric Maurin (Insee) met en lumière les fragmentations du territoire qui existent à l’échelle infra communale. Sans trop de surprise il conclut son propos sur l’existence d’une ségrégation spatiale très forte. Aussi forte, dit-il, qu’aux États-Unis. Son propos est intéressant car il re-assène les