Le fait divers au cœur de la dialectique langienne
Résumé : Cet article présente la façon dont Fritz Lang exploite le fait divers dans deux films M et Fury. Pour lui, il ne s’agit pas simplement de porter à l’écran un simple fait divers mais de montrer comment la société réagit face à ce dernier.
1. Le fait divers dans l’œuvre langienne
Au cours de ses entretiens, tant en Allemagne qu’aux Etats-Unis, Fritz Lang déclare que la première étape de la réalisation d’un film commence irrémédiablement par la lecture attentive des journaux. Le cinéaste repère ainsi de nombreux sujets qui ont inspiré des films tels que Dr. Mabuse, der Spieler, Spione, M, Fury, The Blue Gardenia, ou encore Beyond a reasonable doubt. Le fait divers sert donc de matériau originel au réalisateur.
Il nous semble cependant qu’on ne peut réduire le projet du cinéaste au simple fait de porter à l’écran tel ou tel fait divers particulier. Nous souhaitons démontrer ici, à travers l’étude conjointe de M (1931) et de Fury (1936), que la représentation du fait divers permet au cinéaste d’interroger « ceux qui ont une responsabilité morale dans la cité, que ce soit la justice, la politique, les médias… le citoyen » (NEVERS, C., 1992, p. 86.) et de « démasquer un monde malsain s’indignant et jouissant à la fois du spectacle des perversions criminelles qu’il met « à la une », [et] conduisent fatalement le spectateur à interroger son propre regard, sa propre jouissance indignée de certaines images, sa responsabilité morale vis-à-vis de ce qu’il y voit, de ce qu’il peut y voir de ce qu’elles lui font voir… ». (NEVERS, C., 1992, p. 86.) Le fait divers s’inscrit donc au cœur de la dialectique langienne.
Nous reviendrons tout d’abord sur l’intérêt que Lang porte à la question du meurtre et du fait divers.