« La Peur en Occident » de Jean DelumeauLa Peur en Occident, XIVe-XVIIIe siècle. Une cité assiégée, 1978, Jean Delumeau Vers le milieu du XIVè siècle l’Europe connaît un retournement de la conjoncture : épidémie de peste, puis multiplication des mauvaises récoltes, révoltes rurales et urbaines, guerres civiles et étrangères, menace de plus en plus précise des Turcs et divisions religieuses entre les chrétiens (shisme orthodoxe puis protestant). Cette accumulation aboutit à créer dans tout le corps social un ébranlement psychologique profond et explique les peurs disséminées dans les populations : la mer, la nuit, les revenants, la peste, le manque de pain, de la pression fiscale... . Mais ces peurs n'auraient pas envahi massivement le champ social et culturel si l’Eglise et, en relais, le pouvoir civil ne s'en étaient emparés en désignant Satan comme l’auteur de tous ces maux Satan et en dressant un inventaire de ses agents : le Turc, le juif hérétique, la femme, le sorcier et surtout la sorcière. En nommant ainsi les causes de l’épouvante ressentie, ils substituaient la peur à l’angoisse, la première plus …afficher plus de contenu…

A ces peurs nommées, les clercs, en affirmant que la peste n’était que l’effet de la colère de Dieu, justement irrité par leurs péché, ajoutèrent la peur de soi c’est à-dire la peur sciemment entretenue du péché et du salut personnel dont ils firent le ressort le plus puissant de leurs sermons : J. Delumeau distingue donc d’une part les peurs du plus grand nombre, peurs instinctives irrationnelles devant les maux terrifiants de ces siècles et souvent justifiées dans le contexte mental et technique du temps et d’autre part les noms que la culture dirigeante donne à ces peurs pour mieux les canaliser par des pénitences et des