La morale sociale
La morale sociale doit être définie par référence à la morale personnelle, que l'on appelle communément « morale » tout court. Celle-ci nous dit ce que doit être le comportement de l'homme par référence à sa fin dernière, à son bien suprême. La règle « tu ne tueras pas » est une règle de morale personnelle. La morale sociale nous dit ce que doit être la structure des institutions, Etat, famille, entreprise, etc., par référence à leur mission. La manière dont l'Etat s'acquitte de sa mission de protectorat de la vie individuelle est une question de morale sociale. La morale sociale est à la morale personnelle ce que les structures institutionnelles sont aux comportements personnels. On peut parler équivalemment de morale sociale ou de morale institutionnelle.
I. BASES SOCIOLOGIQUES DE LA MORALE SOCIALE.
Les institutions apparaissent au dernier stade des relations entre les hommes. Ces relations sont d'abord de juxtaposition (sur le palier de l'escalier, sur la plateforme de l'autobus, etc.) ; elles sont plus ou moins fortuites, et se placent sous le signe du respect mutuel. Vite, à l'occasion de ces rencontres, des échanges se développent, échanges de biens ou de services, placés eux aussi sous le signe du respect mutuel, mais ici un respect plus complexe ; il faut que dans les. échanges personne ne soit lésé. Enfin, les hommes se rendent compte que leurs intérêts ne sont pas simplement complémentaires, les uns ayant en trop ce dont manquent les autres, et que les échanges ne suffisent pas ; les hommes se découvrent solidaires, ils ont des intérêts communs, qu'ils ne' peuvent satisfaire qu'ensemble, moyennant un minimum d'organisation définissant la contribution de chacun aux tâches communes et la participation de chacun au bienfait de cette action commune : les ménagères habitant le même immeuble font l'une le marché, l'autre le ménage, pendant qu'une troisième conduit les enfants à l'école ; économie de