La chanson des vieux amants
La chanson des vieux amants constitue la quintessence du style de Brel, en ce qu'il évoque la complexité amoureuse, sur un mode lyrique. Le texte sur lequel nous allons porter notre attention dévoile un parcours sentimental d'une complexité extrême, où deux amants, maintes fois voués à la séparation, parviennent à surmonter tous les tourments. Notre analyse s'attachera à montrer comment la chanson met en jeu l'ambivalence de la relation amoureuse. Cet axe d'étude nous permettra d'aborder les douleurs inhérentes au parcours conjugal, puis de voir que les conflits à répétition n'ont jamais annihilé les fondements même de cet amour.
L'existence des deux amoureux n'a pas été de tout repos, loin s'en faut, puisque les conflits ont émaillé le chemin accompli ensemble. Le texte le souligne par des métaphores qui réfèrent au lexique météorologique : ainsi, « orage » (v.1) et « tempêtes » (v.7) suggèrent des colères qui ont mis à mal la relation sentimentale. La conséquence est quasiment la rupture : elle se trouve clairement évoquée à travers l'hyperbole « mille fois », dont la reprise souligne des intentions absolument réciproques. La femme a été tentée par un départ définitif, l'homme a été soumis au même désir. De ce point de vue, l'ironie nous conduirait au constat suivant : l'égalité entre les deux membres du couple s'avère parfaite. Elle suppose qu'il n'y a pas d'ascendant de l'un sur l'autre, en dépit du rapport frontal que nous avons évoqué. Cette égalité est textuellement illustrée par un aller-retour entre le pronom personnel « je » et le pronom personnel « tu » : « Je sais tous tes sortilèges » (v.15)/ « Tu sais tous mes envoûtements »(v.16). Justement, c'est sans doute cette réciprocité des désirs qui a paradoxalement sauvé le couple. Nous l'aborderons un peu plus tard.
Par ailleurs, l'éloignement est le corollaire d'une infidélité dont l'existence ne fait l'objet d'aucune