.Son livre Punishing the Poor: The Neoliberal Government of Social Insecurity (Duke University Press, mai 2009) rompt avec le schéma « crime et châtiment » mais aussi avec l’opposition rituelle entre théorie matérialiste (Marx) et théorie symbolique (Durkheim) de la pénalité. Wacquant utilise le concept de « champ bureaucratique » de Bourdieu pour critiquer les vues influentes de Frances Fox Piven (sur l’aide sociale), Michel Foucault (sur la prison et la « société disciplinaire »), David Garland (sur la « culture du contrôle ») et David Harvey (sur le néolibéralisme économique) pour développer une théorie de l’État néolibéral qui insère la police, la prison et la justice comme éléments de la « main droite » de l’État. Selon cette théorie, les programmes dits d’activation de l’aide sociale (« workfare ») et les politiques policières et pénales expansives et agressives qui émergent dans les pays avancés au tournant du xxie siècle, loin d’être des aberrations, sont des composantes à part entière du nouveau Léviathan à l’ère de l’insécurité sociale. Wacquant tente de montrer que les discours dénonçant le « programme sécuritaire » (en France) et le « prison industrial complex » (aux États-Unis), loin d’élucider la montée de l’État pénal, participent paradoxalement de sa construction. Rejetant le langage politique et polémique de la « répression », Wacquant argue que la pénalisation de la marginalité urbaine doit se comprendre à travers la notion de production : production de nouvelles catégories (les « violences urbaines »), de nouvelles figures sociales (la « racaille », l’« underclass »), de nouveaux savoirs et experts (les conseillers en sécurité urbaine), de nouvelles bureaucraties et politiques étatiques (comme les « cellules de veille » et le RMA). Finalement, l’activation de l’« insécurité » comme thème de débat et d’action publique participe de la formation d’un nouveau type d’État, libéral « en haut » et paternaliste « en bas » dont le fonctionnement est