Hernani acte scéne4
Oui, de ta suite, ô roi ! De ta suite ! -j' en suis.
Nuit et jour, en effet, pas à pas, je te suis !
Un poignard à la main, l' oeil fixé sur ta trace, je vais ! Ma race en moi poursuit en toi ta race !
Et puis, te voilà donc mon rival ! Un instant, entre aimer et haïr je suis resté flottant, mon coeur pour elle et toi n' était point assez large, j' oubliais en l' aimant ta haine qui me charge ; mais puisque tu le veux, puisque c' est toi qui viens me faire souvenir, c' est bon, je me souviens !
Mon amour fait pencher la balance incertaine, et tombe tout entier du côté de ma haine.
Oui, je suis de ta suite, et c' est toi qui l' as dit !
Va, jamais courtisan de ton lever maudit, jamais seigneur baisant ton ombre, ou majordome ayant à te servir abjuré son coeur d' homme, jamais chiens de palais dressés à suivre un roi, ne seront sur tes pas plus assidus que moi !
Ce qu' ils veulent de toi, tous ces grands de Castille, c' est quelque titre creux, quelque hochet qui brille, c' est quelque mouton d' or qu' on se va pendre au cou ; moi, pour vouloir si peu je ne suis pas si fou !
Ce que je veux de toi, ce n' est point faveurs vaines, c' est l' âme de ton corps, c' est le sang de tes veines, c' est tout ce qu' un poignard, furieux et vainqueur, en y fouillant long-temps peut prendre au fond d' un coeur. Va devant, je te suis. Ma vengeance qui veille avec moi, toujours marche et me parle à l' oreille !
Va, marche, je suis là, je te pousse, et sans bruit mon pas cherche ton pas, et le presse et le suit !
Le jour tu ne pourras, ô roi, tourner la tête, sans me voir immobile et sombre dans ta fête ; la nuit tu ne pourras tourner les yeux, ô roi, sans voir mes yeux ardents luire derrière toi ! il sort par la petite porte.
fin du premier