Gertrude d'aalst et ses dépendants. texte
« Gertrude, épouse du seigneur d’Ardres, Arnoul, bien qu’elle se glorifiât d’être issue d’une noble lignée et se rendît encore plus noble par la superbe de ses paroles et la retenue de ses actes, était cependant avide de richesses et de biens ; elle était connue et renommée pour sa cupidité et son avarice. A propos de ce vice – nous tairons les autres -, un jour qu’elle faisait chercher et rassembler des agneaux, les ministériaux (satrapae) arrivèrent à la maison d’une très pauvre femme qui avait sept petits enfants ; elle pleura et dit qu’elle n’avait rien à donner à manger à ses enfants qui pleuraient aussi. Les sergents du ministérial et les plus mauvais des serviteurs s’approchèrent et voulurent se jouer de la pauvre femme en exigeant d’elle un agneau ; la femme dit simplement qu’elle n’avait ni mouton ni bœuf, mais que s’ils voulaient emporter avec eux un petit enfant à leur maîtresse, elle le présenterait bien volontiers pour qu’il soit nourri et entretenu. Lorsque ces serviteurs très mauvais rentrèrent et se présentèrent à la dame, non seulement ils se moquèrent de la pauvre dame, mais l’accusèrent servilement et en parlèrent faussement. Les serviteurs revinrent chez la femme et exigèrent, l’enfant promis ; et que la mère le voulût ou non, la dame obtint la redevance. Elle fit nourrir l’enfant et l’adopta pour sien, à la place de l’agneau. Mais quand la petite fille (-car c’était un enfant de sexe féminin) parvint à l’âge du mariage, ô honte !, elle était déjà servante et en portait le nom. La maîtresse la maria à quelque homme et la réduisit, elle et ses hoirs, en servile condition ; elle l’y précipita et l’y maintint à perpétuité.
Cette même Gertrude, qui avait amené avec elle à Ardres, à ce que l’on dit, des hommes libres de sa terre, à savoir Oostbourg, pour la servir, les blâmait souvent avec des paroles coléreuses et furieuses, les traitant d’ingrats, d’infidèles et de serfs – ô