Gargantua, gargantua, chapitre xiii, 1534, 15
Parcours : Rire et savoir
Lecture linéaire n°2, Rabelais, Gargantua, chapitre XIII, 1534
- Retournons, dit Grandgousier, à notre propos.
- Lequel, dit Gargantua, chier ?
- Non, dit Grandgousier, mais se torcher le cul.
- Mais, dit Gargantua, voulez-vous me payer un tonneau de vin breton, si je vous épate sur ce sujet ?
- Oui, vraiment, dit Grandgousier. 5
- Il n'y a pas besoin, dit Gargantua, de se torcher le cul …afficher plus de contenu…
Un de ces jours je te ferai passer docteur en gaie science, pardieu, car tu as plus de raison que d'années. Mais poursuis ce propos torcheculatif, je t’en prie. Et par ma barbe, au lieu d'un tonneau, tu en auras soixante ; je précise : de ce bon vin breton, 10 qui ne se fait pas en Bretagne, mais dans ce bon pays de Verron1.
- Je me torchai, dit Gargantua, d’un couvre-chef, d’un oreiller, d’une pantoufle, d’une gibecière, d’un panier. Mais quel déplaisant torche-cul ! Puis d’un chapeau, et notez que les chapeaux sont les uns ras, les autres poilus, les autres veloutés, les autres en taffetas, les autres satinés. Le meilleur d'entre tous est celui de fourrure. Car il enlève très bien la matière fécale. …afficher plus de contenu…
« Mais en conclusion, je dis et maintiens qu'il n'y a pas de torche-cul supérieur à un oison bien en duvet, pourvu qu'on lui tienne la tête entre les jambes. Et vous pouvez me croire sur mon honneur. Car vous sentez au trou du cul une volupté mirifique3, tant de la douceur de ce duvet que de la douce chaleur de 20 l'oison qui se communique facilement du boyau culier et des autres viscères, jusqu'à monter à la région du cœur et du cerveau. Et ne pensez pas que la béatitude des héros et des demi-dieux des Champs Elysées4 vient de leur asphodèle5 ou de leur ambroisie, ou du nectar6 comme disent les vieilles d’ici. Elle est, selon mon opinion, qu'ils se torchent le cul d’un oison. Et telle est l'opinion de Maître Jean Duns Scot7. »
Notes