Flaubert
Un exemple frappant de cela est donné par l'analyse du style de Flaubert, dans un article publié en 1880, à la mort de l'écrivain. Brunetière n'aime pas Flaubert, il juge que toute son oeuvre après Madame Bovary a été un échec, en particulier Salammbô et L'Éducation sentimentale. Mais il reconnaît en Flaubert un maître bien supérieur à Balzac : « On prétendit, quand parut Madame Bovary, qu'il y avait là des pages que Balzac eût signées. Certes ! s'il avait pu les écrire ! » Flaubert est un maître par la marque qu'il a imposée à la littérature, par son invention ou par sa systématisation des « procédés de la rhétorique naturaliste ».
Brunetière insiste sur la transposition du sentiment dans la sensation, procédé non pas nouveau - il existait chez Chateaubriand -, mais dont Flaubert tire un autre effet : « La comparaison n'est plus [...] une intervention personnelle du narrateur dans son propre récit, elle devient en quelque sorte un instrument d'expérimentation psychologique. » Brunetière ne nomme pas encore le style indirect libre, mais l'idée est là. « Elle se rappela [...] toutes les privations de son âme, et ses rêves tombant dans la boue, comme des hirondelles blessées. »
Le commentaire est heureux: la comparaison flaubertienne est « l'expression d'une correspondance intime entre les sentiments et les sensations des personnages qui sont en scène. L'auteur est vraiment absent de sa comparaison. » Flaubert « a tiré d'un procédé connu des effets nouveaux ; et inventer, en littérature, qu'est-ce autre chose ? » Après avoir signalé d'autres formes de l'impassibilité flaubertienne (la description, l'imparfait), Brunetière conclut : « C'est une date que Madame Bovary dans le roman français. Elle a marqué la fin de quelque chose et le commencement d'autre chose. »
Le critique se livre à une comparaison intéressante. Madame Bovary parut en son temps, dit-il en des termes qui ne sont pas sans rappeler le