Fiche de lecture droit public
2122 mots
9 pages
Dans la conférence du 11 mars 1882, publiée sous le titre de Qu'est-ce qu'une nation ?, Ernest Renan analyse une idée claire en apparence, mais dont les interprétations multiples peuvent données lieu à des malentendus dangereux : le terme de nation. L'enjeu du texte est donc double. Il s'agit d'une part de critiquer les mauvaises définitions de la nation, définitions que l'on peut qualifier de « fondamentalistes » au sens où elles cherchent à fonder la nation dans la race, la langue ou dans tout autre élément particulier, et donc de se prémunir contre les dangers qu'elles font courir à l'Europe. Et il s'agit d'autre part, de définir la nation, comprise comme un « mode de groupements » (p.7) particuliers, historiquement déterminé. Ce dernier point pose un problème capital : si la nation n'a pas de fondement, comment penser l'articulation entre un peuple et son histoire, ses symboles, et tous ces éléments qui composent, sans la fonder une nation ? Pour répondre, Ernest Renan retrace dans un premier temps l'origine historique du mode de groupement particulier qu'est la nation, puis il donne une définition négative de la nation, en disant ce qu'elle n'est pas et en critiquant les erreurs auxquelles le fondamentalisme nationaliste amène, enfin il donne une définition positive de la nation en proposant une articulation originale entre un peuple et son histoire.
1. Origine historique de la nation
L'organisation en nation est un mode de groupement humain qui une nouveauté par rapport à l'Antiquité. Son origine peut être fixée à la chute de l'Empire romain d'Occident vers 476 après J.-C. Les invasions germaniques du Ve au Xe siècle imposent alors dans toute l'Europe occidentale des dynasties et une aristocratie militaire. Les Germains créent de nouveaux blocs comme la Burgondie, la Lombardie ou la Normandie. L'Empire franc en assure l'unité temporaire sous Charlemagne avant de donner naissance à des divisions immuables : la France, l'Allemagne, l'Angleterre, l'Italie et