Fables
1) La Colombe et la Fourmi:
Le long d'un clair ruisseau buvait une Colombe,
Quand sur l'eau se penchant une Fourmi y tombe.
Et dans cet océan l'on eût vu la Fourmi
S'efforcer, mais en vain, de regagner la rive.
La Colombe aussitôt usa de charité :
Un brin d'herbe dans l'eau par elle étant jeté,
Ce fut un promontoire où la Fourmi arrive.
Elle se sauve ; et là-dessus
Passe un certain Croquant qui marchait les pieds nus.
Ce Croquant, par hasard, avait une arbalète.
Dès qu'il voit l'Oiseau de Vénus
Il le croit en son pot, et déjà lui fait fête.
Tandis qu'à le tuer mon Villageois s'apprête,
La Fourmi le pique au talon.
Le Vilain retourne la tête :
La Colombe l'entend, part, et tire de long.
Le soupé du Croquant avec elle s'envole :
Point de Pigeon pour une obole.
2) Le serpent et la lime :
On conte qu'un Serpent voisin d'un Horloger
(C'était pour l'Horloger un mauvais voisinage),
Entra dans sa boutique, et cherchant à manger, N'y rencontra pour tout potage
Qu'une Lime d'acier qu'il se mit à ronger.
Cette Lime lui dit, sans se mettre en colère : Pauvre ignorant ! et que prétends-tu faire ? Tu te prends à plus dur que toi. Petit serpent à tête folle, Plutôt que d'emporter de moi Seulement le quart d'une obole, (1) Tu te romprais toutes les dents : Je ne crains que celles du temps.
Ceci s'adresse à vous, esprits du dernier ordre,
Qui n'étant bons à rien cherchez sur tout à mordre. Vous vous tourmentez vainement.
Croyez-vous que vos dents impriment leurs outrages Sur tant de beaux ouvrages ? (2)
Ils sont pour vous d'airain, d'acier, de diamant .
3) Le petit poisson et le pêcheur :Petit poisson deviendra grand,Pourvu que Dieu lui prête vie.Mais le lâcher en attendant,Je tiens pour moi que c'est folie ;Car de le rattraper il n'est pas trop certain.Un Carpeau qui n'était encore que fretinFut pris par un Pêcheur au bord d'une rivière.Tout fait nombre, dit l'homme en voyant son butin ;Voilà