Enquêter en milieu populaire
La culture bretonne a fait preuve d'une belle vitalité au cours des années 1990 et 2000. Les festoù-noz ont attiré des foules, les ventes de disques de musique bretonne ont atteint des sommets, l'enseignement de la langue bretonne s'est développé avec dynamisme et diverses initiatives nouvelles ont été prises (notamment la création de TV Breizh).
Cet élan ne doit toutefois pas être surestimé. Certes, la langue bretonne bénéficie d'un vif regain de faveur ; néanmoins, sa pratique continue toujours à s'effondrer et son taux de transmission de génération en génération est presque nul. De plus, si la musique et la danse ont connu une belle fortune, il n'en est pas de même de tous les pans de la culture bretonne ; l'histoire de la Bretagne, par exemple, reste largement méconnue de la masse des Bretons. Enfin, évidemment, la Bretagne ne se réduit pas à sa culture...
Cependant, l'élan culturel breton est une réalité incontestable, qui mérite qu'on s'y arrête. S'agit-il d'un simple épiphénomène ? Certains analystes ou acteurs de la vie culturelle bretonne considèrent qu'il ne s'agit que d'un pur produit de marketing. Que le marketing ait pu jouer un rôle de déclencheur dans le succès de la musique bretonne est loin d'être invraisemblable ; toutefois, il serait sans doute réducteur de tout ramener à une démarche mercantile. D'autres observateurs parlent d'un " effet de mode ". Cela paraît être une explication un peu courte et pourtant, tout au long du XXe siècle, on constate bien - sans l'expliquer - que la culture bretonne a bénéficié d'une mode tous les vingt ans.
Il y a cependant plus que ce mystérieux cycle vicésimal et que la stratégie marketing pour expliquer l'élan culturel breton : la culture bretonne bénéficie, en effet, d'une revalorisation émotionnelle, qui s'enracine dans une évolution de fond de la société contemporaine. Depuis le XIXe siècle, être " moderne " signifiait s'arracher à la tradition et à la communauté