Droit naturel article encyclopédie
L'usage de ce mot est si familier, qu'il n'y a presque personne qui ne soit convaincu au-dedans de soi-même que la chose lui est évidemment connue. Ce sentiment intérieur est commun au philosophe et à l'homme qui n'a point réfléchi ; avec cette seule différence qu'à la question, Qu'est-ce que le droit ?, celui-ci manquant aussitôt et de termes et d'idées, vous renvoie au tribunal de la conscience et reste muet ; et que le premier n'est réduit au silence et à des réflexions plus profondes, qu'après avoir tourné dans un cercle vicieux qui le ramène au point même d'où il était parti, ou le jette dans quelque autre question non moins difficile à résoudre que celle dont il se croyait débarrassé par sa définition.
Le philosophe interrogé dit, le droit est le fondement ou la raison première de la justice. Mais qu'est-ce que la justice ? C'est l'obligation de rendre à chacun ce qui lui appartient. Mais qu'est-ce qui appartient à l'un plutôt qu'à l'autre dans un état de choses où tout serait à tous, et où peut-être l'idée distincte d'obligation n'existerait pas, encore ? Et que devrait aux autres celui qui leur permettrait tout, et ne leur demanderait rien ? C'est ici que le philosophe commence à sentir que de toutes les notions de la Morale, celle du droit naturel est une des plus importantes et des plus difficiles à déterminer. Aussi croirions-nous avoir fait beaucoup dans cet article, si nous réussissions à établir clairement quelques principes à l'aide desquels on pût résoudre les difficultés les plus considérables qu'on a coutume de proposer contre la notion du droit naturel. Pour cet effet il est nécessaire de reprendre les choses de haut, et de ne rien avancer qui ne soit évident, du moins de cette évidence dont les questions morales sont susceptibles, et qui satisfait tout homme sensé.
I. Il est évident que si l'homme n'est pas libre, ou que si ses déterminations instantanées, ou même ses oscillations, naissant de quelque chose de matériel