Dissertation sur Victor Lévy Beaulieu et la Contre culture
Le mouvement de contestation social n’est pas l’apanage exclusif de l’homme moderne, comme en témoigne les innombrables révolutions qui ont enflammé l’histoire. Toutefois, l’homme ne s’est sans doute jamais autant qu’au vingtième siècle remis en question dans sa forme d’expression la plus créative : l’art. Cette contestation s’est manifestée entre autres par le mouvement de la contre-culture, lui-même tributaire d’un grondement mis en éveille par les premiers tenants de la modernité artistique, dont les balbutiements se font sentir dès avant la Première Grande guerre. Au Québec, la contre-culture fait rage particulièrement dans les années soixante-dix, période où se fait connaître l’auteur Victor-Lévy Beaulieu, qui possède une vision bien personnelle de ce que devrait être la culture, conception qu’il expose évidemment dans le cadre d’articles critiques, mais qu’il poétise également dans la processus même de ses œuvres romanesques. Or, quels sont les artifices par lesquels l’auteur de Don Quichotte de la démanche manifeste sa prise de position idéologique à l’intérieur de l’espace romanesque? Comme ceux-ci sont d’une richesse et d’une complexité qui mériteraient une exégèse par trop considérable, le présent travail se bornera à démontrer que le rôle contre-culturel d’Abel est assumé par la médiation du personnage tragique, dont il reproduit les traits caractéristiques. Une brève définition du personnage tragique dans l'œuvre de fiction constituera la pierre d’achoppement de cette analyse. S’en suivra une mise en rapport des différentes constituantes de ce type de personnage avec les traits saillants d’Abel, pour se solder sur la mise en relation de ces éléments avec certains critères de l’idéologie contre-culturelle.
Le docteur ès Lettres Alain Beretta donne ces quelques définitions du genre et du personnage tragique : « Est tragique tout ce qui montre à l’homme qu’il ne peut pas contrôler sa vie. […] Le tragique naît au