Dissertation sur racines et ailes
Les « ailes » sont bien sûr ce qui permet d'aller voir au-delà de l'horizon commun, de ne pas être chevillé aux préjugés de sa tribu, de se représenter le monde où l'on est né non comme « Le » monde mais comme un monde possible, parfois même (au prix le plus souvent d'une initiation spécifique) de le comparer non seulement aux mondes d'à côté mais aussi aux mondes reconstitués d'hier et même à des mondes imaginés, des mondes qui n'ont encore jamais existé mais sont plausibles, des mondes construits en idée comme des avenirs possibles. Les ailes sont ce qui peut permettre de se représenter de façon inédite les amours homosexuelles comme aussi humaines et aussi naturelles que celles prescrites par la tradition. Ce qui permet à un moment d'échanger non plus un objet contre un objet mais un objet contre un symbole monétaire ou un objet contre une valeur future. Ce qui permet de voir des demoiselles d'Avignon ou d'ailleurs avec des combinaisons inouïes de lignes, volumes et couleurs. Ce qui permet de se projeter raisonnablement dans plusieurs décennies selon divers scénarios économiques ou écologiques. Ce qui permet de regarder le monde non seulement à travers les « yeux » du milieu où l'on est né ou à travers les « lunettes » du milieu où l'on évolue mais, aussi, fût-ce de façon approximative, avec les yeux d'autres classes ou d'autres peuples. Ce qui permet à Galilée d'observer les ombres lunaires en supposant, de façon scandaleuse, presque inimaginable au regard des croyances et valeurs de son temps, que la Terre, fût-elle Création de Dieu, peut n'être ni au centre de l'univers, ni d'une nature essentiellement différente des autres planètes.
Où les ailes héritent cette image ?
Une fois que nos enfants sentent en sécurité et fixent, nous devons les préparer