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Texte 1 : « Lettres modérée sur la chute et la critique du Barbier de Séville », Beaumarchais
Beaumarchais répond à un critique qui avait jugé négativement sa pièce.
« La pièce, a-t-il dit, n’a pas de plan. »
Est-ce parce qu’il est trop simple qu’il échappe à la sagacité de ce critique adolescent ?
Un vieillard amoureux prétend épouser demain sa pupille ; un jeune amant plus adroit le prévient, et ce jour même en fait sa femme, à la barbe et dans la maison du tuteur [1]. Voilà le fond dont on eût pu faire, avec un égal succès, une tragédie, une comédie, un drame, un opéra, et caetera. L’Avare de Molière est-il autre chose ? Le grand Mithridate [2] est-il autre choses ? Le genre d’une pièce, comme celui de toute action, dépend moins du fond des choses que des caractères qui les mettent en œuvre.
Quant à moi, ne voulant faire, sur ce plan, qu’une pièce amusante et sans fatigue, une espèce d’imbroille [3], il m’a suffi que le machiniste [4], au lieu d’être un noir scélérat, fût un drôle de garçon, un homme insouciant, qui rit également du succès et de la chute de ses entreprises, pour que l’ouvrage, loin de tourner en drame sérieux, devînt une comédie fort gaie ; et de cela seul que le tuteur est un peu moins sot que tous ceux qu’on trompe au théâtre, il a résulté beaucoup de mouvements dans la pièce, et surtout la nécessité d’y donner plus de ressorts aux intrigants.
Au lieu de rester dans ma simplicité comique ; si j’avais voulu compliquer, étendre et tourmenter mon plan à la manière tragique ou dramique [5] , imagine-t-on que j’aurais manqué de moyens dans une aventure dont je n’ai mis en scènes que la partie la moins merveilleuse ?
En effet, personne aujourd’hui n’ignore qu’à l’époque historique où la pièce finit gaiement dans mes mains, la querelle commença sérieusement à s’échauffer, comme qui dirait derrière la toile, entre le docteur et