Commentaire d'une citation
Bon nombre des pièces de Molière témoignent du fait que le statut de la femme n’est guère enviable : mariée contre son gré et considérée comme un être dont la sensibilité interdit un raisonnement sérieux, elle ne peut donc prétendre à une autonomie et doit passer de la tutelle de son père à celle de son mari. Un tel statut la conduit à ne pouvoir être un être comme les autres, et semble nous enseigner rétrospectivement, à partir d’une conscience démocratique contemporaine, que nos sociétés ont considérablement progressé du point de vue de la reconnaissance des droits de la femme.
Dès lors, si Mme de Sévigné pouvait affirmer que « le nom de veuve emporte celui de liberté », il semble qu’il faut considérer une telle affirmation comme un constat d’un autre temps, à l’aune duquel le veuvage était le seul moyen pour la femme, dans une société fondée sur les droits exclusifs de l’homme, de se libérer de la tutelle du masculin et d’accéder à une liberté. Pourtant, cette affirmation paraît problématique, dans la mesure où le veuvage n’est qu’une situation déficiente, dans laquelle celle qui a perdu son mari n’est libre qu’en raison de sa perte, et n’a de droits à être libre que parce que le mari par lequel elle accédait à une reconnaissance sociale n’est plus. La veuve n’a donc pas exactement le même type de liberté que l’homme, et ne peut être considérée comme parfaitement libre par elle-même. Cette différence est-elle toutefois réellement problématique ? Si les raisons de la liberté, et la perception sociale de cette liberté, sont à l’évidence différentes, ne faut-il pas, en pratique, reconnaître que la différence n’existe pas réellement ?
Nous nous attacherons dans un premier temps à montrer que la liberté du veuvage est effectivement une liberté au sens propre du terme, puisque la veuve s’est libérée de l’entrave sociale du mariage (I). Nous en viendrons toutefois à