Commentaire de texte : albert cohen, extrait du livre de ma mère, chap. 6
Dans Le Livre de ma mère, publié en 1954, Albert Cohen rend hommage à sa mère disparue. Certains chapitres sont plus spécialement consacrés à ses souvenirs d’enfance à Marseille au début du siècle ; c’est le cas de ce passage dans lequel l’auteur raconte ses promenades dominicales avec sa mère. A travers le récit d’une scène précise, il évoque un souvenir représentatif de toute une partie de son enfance, en même temps qu’il dresse le portrait de deux exilés et jette un regard rétrospectif à la fois mélancolique et ironique sur leurs difficultés à s’insérer dans leur nouvel univers. Nous analyserons donc le récit du souvenir d’enfance, puis nous verrons que l’auteur considère ce souvenir avec un regard distancié et ironique, et nous terminerons en montrant comment ce récit constitue aussi un vibrant hommage à la figure maternelle.
La dimension autobiographique du texte est perceptible dès les premières lignes. Plusieurs verbes employés au présent d’énonciation expriment en effet le regard rétrospectif de l’auteur : « Je me souviens » (l. 1), « je revois » (l. 4, l. 16), « je considère » (l. 11). Le thème du passage est lui aussi indiqué dès la première phrase : « nos promenades du dimanche » (l. 1). Cohen présente ensuite un ensemble de souvenirs à l’imparfait : temps de l’habitude, de la répétition, il ancre l’enfant dans un passé répétitif et donc mémorisé nettement. Il précise d’ailleurs qu’il s’agit de promenades habituelles, accomplies sur une longue période : « en été » (l. 1). Les circonstances sont clairement évoquées : l’enfant et sa mère vont faire le tour de « la Corniche », qui dénote la ville de Marseille (l. 2) ; le moyen de transport est précisé (« le tramway », l. 3), ainsi que la durée de la promenade (« une heure » l. 2).
L’essentiel réside surtout dans le duo que le jeune Albert Cohen forme avec sa mère. Les deux personnages sont en effet associés tout au long du