Camus l'étranger le meutre Commentaire
Ce texte constitue l’excipit de la Première partie de L’Etranger, et vient clore l’évocation de la vie somme toute insouciante que menait jusqu’alors le personnage principal, Meursault. La scène se déroule sur une plage, peu de temps après qu’une violente altercation a opposé son ami Raymond à un groupe d’Arabes. Meursault a sur lui le revolver de son ami. Alors que ses compagnons s’apprêtent à prendre le chemin du retour, Meursault revient seul sur la plage, sans raison apparente, sinon la fatigue devant « l’effort qu’il fallait faire pour monter l’étage de bois [du cabanon] et aborder encore les femmes. » Retrouvant par hasard l’un des deux Arabes, Meursault va commettre un geste irréparable.
L’événement est capital et tout le destin du personnage s’y joue, en quelques instants.
Nous montrerons tout d’abord que la marche de Meursault à la rencontre de sa victime revêt un caractère fatidique1. Nous soulignerons ensuite le rôle essentiel que jouent les éléments naturels dans ce cheminement vers le meurtre : plus « agi » qu’acteur, Meursault est d’abord victime de son hypersensibilité au monde. Nous montrerons enfin que ce meurtre s’apparente pour le personnage à une véritable apocalypse, à un effondrement définitif de son monde.
I Un personnage en marche vers son destin
A l’instar de l’ensemble du roman, le récit de ce meurtre est effectué sur le mode rétrospectif (il s’agit d’un récit au passé) et du point de vue interne du narrateur-personnage, comme le montrent les nombreux verbes d’opération de la pensée (par exemple : « je pensais », l.9, « j’ai pensé », l.25, « j’ai compris », l.43) et de perception qui émaillent le texte, notamment ceux qui relèvent du champ lexical de la vision (ex : « je voyais », l.8, « j’ai vu », l.11) . C’est avec une grande précision que Meursault rend compte ici des multiples sensations – visuelles, auditives, thermiques… - qu’il a éprouvées dans les