Calas
L'affaire est révélatrice du traitement, à l'époque, d'un suspect, puis accusé, sans l'appui d'un avocat (remplacé par des libelles nommés factums), où une hiérarchie des preuves (adminicule et monitoire), le secret de l'instruction et une procédure inquisitoriale transforment le présumé coupable en victime expiatoire.
La famille Calas, habitait au 16, rue des Filatiers (aujourd'hui n° 50) à Toulouse. Le 13 octobre 1761, leur fils aîné, Marc-Antoine, se pend dans la boutique familiale. Ne voulant pas qu'il soit considéré comme suicidé et subisse des obsèques infamantes, « être traîné sur la claie », la famille Calas, tout d'abord, n'indique pas aux autorités les circonstances exactes de sa découverte et prétend avoir trouvé le malheureux étranglé.
Mais les Calas sont protestants, et cela suffit pour que le capitoul David de Beaudrigue, convaincu par des rumeurs de voisinage alléguant la volonté de Marc-Antoine de se convertir au catholicisme, exige un complément d'enquête et fasse soumettre Jean Calas à la question.
L'étranglement sera infligé à Jean Calas après le verdict du procès par le parlement de Toulouse. Ce dernier le condamne à mort le 10 mars 1762, sans que le jugement ne soit motivé. Le malheureux Calas est condamné au supplice de la roue. Il subit la question, une longue séance de torture, mais n'avoue rien. Il proclame son innocence. Roué Place Saint-Georges, Jean Calas est étranglé puis brûlé deux heures plus tard.
Exilé, un autre fils de Jean Calas, Pierre, se rendit dans la ville calviniste de Genève, où il rencontra Voltaire. Le philosophe crut d'abord l'accusation fondée et alla rédiger scandaleusement même une lettre incendiaire sur Jean Calas. Mais, convaincu par Pierre de son innocence, il forma un groupe de pression avec ses amis et utilisa son ironie corrosive pour que justice soit faite.