Baudelaire, la mort des amants
Tiré de Les Fleurs du Mal
De Baudelaire
1 Nous aurons des lits pleins d'odeurs légères,
Des divans profonds comme des tombeaux,
Et d'étranges fleurs sur des étagères,
Ecloses pour nous sous des cieux plus beaux.
5 Usant à l'envi leurs chaleurs dernières,
Nos deux cœurs seront deux vastes flambeaux,
Qui réfléchiront leurs doubles lumières
Dans nos deux esprits, ces miroirs jumeaux.
9 Un soir fait de rose et de bleu mystique,
Nous échangerons un éclair unique,
Comme un long sanglot, tout chargé d'adieux;
12 Et plus tard un Ange, entr'ouvrant les portes,
Viendra ranimer, fidèle et joyeux,
Les miroirs ternis et les flammes mortes.
« La mort pour le poète est la victoire. » disait Cernuda, poète espagnol. Cette mort est mise en exergue et est idéalisée dans Les Fleurs du Mal de Baudelaire. Cette œuvre représente le labeur de toute une vie. Celle-ci débute en 1832 à Paris mais sera rapidement assombrie par le décès de son père. Moins d’une année après le départ de la figure paternelle, sa mère se remarie avec le général Jacques Aupick. Pour Baudelaire, ce remariage est une trahison mais est surtout un obstacle à tout ce qu’il aime : la poésie, sa mère, la vie. Rapidement, cette vie que l’auteur déchu a chérie le décevra. Désillusionné de cette dernière et pour échapper à la réalité, le poète se plonge dans les paradis artificiels et goûte aux plaisirs charnels. Au travers de son œuvre, l’auteur tente de construire des ponts entre des notions parfois antinomiques telles que le mal et la beauté ou encore le bonheur et l’idéal inaccessible. En tant que bon romantique, il fait sien le thème de la mort jusqu’à lui consacrer une section entière. « La Mort des Amants » est le premier poème de celle-ci qui en comporte en tout six. Cependant, ce sonnet écrit en décasyllabes ne reflète pas une image lugubre de la mort telle que l’on pourrait s’y attendre. Alors que les auteurs classiques en ont toujours fait un événement menaçant et