{draw:frame} La décapitation de l'oie (pp. 240-245). La dernière manifestation du point de vue est hautement symbolique dans le récit qu'Anselmie donne, rapporté par Saucisse, de la décapitation de l'oie. Car Anselmie est, dès le début du roman, présentée comme la personne la plus sotte du village ("plus têtue qu'une mule", p. 47, "une vraie brute", dit Saucisse p. 240). Et c'est par son regard borné que Giono nous raconte la longue fascination de Langlois pour le sang sur la neige. On a l'impression d'une énorme distance, d'un malentendu entre le héros et son entourage, d'un signe évident de sa solitude. En même temps, le lecteur est encore invité à deviner l'objet de cette fascination, à comprendre entre les lignes que Langlois découvre ici la dimension de sa propre cruauté et qu'il est prêt, peut-être, comme M. V., à passer à l'acte. Moment-clé donc où Langlois est confronté à sa conscience et prend la décision de supprimer en lui la pulsion qui, dès lors, peut lui apparaître comme le seul divertissement possible. En ce sens, son suicide peut être interprété comme le geste royal par lequel l'individu agit sur son destin et se sacrifie pour la communauté. Pour le récit rapide de ce suicide, on retrouve le narrateur du début, extérieur à l'affaire et capable d'en interpréter le sens symbolique ("voilà ce qu'il dut faire", p. 243). La dynamite transformée en cigare accomplit les signes conjugués depuis quelques pages et apparaît comme le symbole d'une liberté souveraine, presque décontractée, devant la mort. Seules les dernières phrases permettent l'élargissement métaphysique : "_La tête de Langlois prenait, enfin, les dimensions de l'univers_" (p. 243). Cet "enfin" peut être interprété comme un soulagement. La référence, cette fois directe, à Pascal, place le roman sous son angle véritable. La question feint de rechercher l'auteur ("qui a dit...?"), comme pour lui donner raison, mais elle tait volontairement la solution pascalienne. Le silence qui suit la