Art et technique
Dans notre société, l’artiste comme le technicien est un prolétaire qui n’a pour toute richesse que sa force de travail. Le produit de ce travail s’achète, il est coté sur le marché de l’art.
Selon les deuxième, troisième et quatrième groupes de remarques ci-dessus, l’architecte serait plus près du technicien que de l’artiste et le potier plus près de l’artiste que de l’artisan.
Il n’y a pas d’art sans maîtrise d’une technique. (Il faut apprendre à jouer d’un instrument, apprendre à dessiner...)
L’évolution des arts est étroitement liée à l’évolution des techniques (nouveaux outils, nouveaux matériaux, nouveaux procédés, nouvelles disciplines...)
L’opposition entre la contemplation artistique et l’action technique n’a pas beaucoup de sens, en particulier en architecture. « L’art ne saurait être exclusivement soumis aux règles d’un esthétisme gratuit. Par son essence, il est fonctionnel. » Le Corbusier, La Charte d’Athènes.
La principale différence entre un original et une copie n’est pas la valeur esthétique mais la valeur marchande.
Conclusion
S’il y a encore une distinction pertinente entre art et technique, c’est peut-être celle proposée par Etienne Souriau : l’art produit d’abord des existants qui n’ont pas besoin d’autre justification que d’être eux-mêmes. C’est pourquoi l’art est scandaleux pour la pensée technicienne : il s’enferme en lui-même, ne vise que lui-même. Ainsi, quand vient la question de préférer telle œuvre plutôt que telle autre, on n’a pas le secours de la fonction pratique pour donner une réponse, même approximative.
Mais au moment même où l’art semble auto-subsistant, autosuffisant, sa fonction sociale éclate. L’art est le produit d’une société, de ses valeurs, de sa culture. Il en est à la fois le reflet, la justification et l'éventuelle