Art et divertissement
S’il est une idée qui semble aller de soi aujourd’hui, c’est bien que l'idée que l’art est un moyen d’évasion. Elle va tellement de soi, que la plupart d’entre nous ne faisons même plus la différence entre les productions de la société de consommation qui ont pour vocation le divertissement et les créations artistiques qui impliquent, de la part de leur créateur, comme de la part de l’amateur d’art, un véritable investissement, voire une vraie passion. Nous voyons dans l’art une sorte de moyen de nous procurer des extases colorées, des extases musicales dont la seule fonction serait de faire oublier cette réalité terne, brutale dans laquelle nous vivons. L’amour de l’art et l’éloge de la fuite : un seul et même combat ! Cependant, c’est oublier les efforts surhumains déployés par l’art pour dénoncer, dépasser, élever, transfigurer la réalité elle-même. C’est aussi oublier une constante, souvent retenue dans l’opinion, selon laquelle l’art véritable, c’est celui qui est sensé faire « passer un message », être un « art engagé », ce qui contredit complètement l’hypothèse précédente. A quoi bon chercher à se battre contre l’ignominie du monde, contre la bêtise de notre société avec de la toile, des chansons, de la musique, des images, si le but de l’art est seulement la fuite éperdue ? La question de fond est donc de savoir quel rapport l’art entretient avec la réalité, si il est dans son essence de la délaisser, si il est de son essence de chercher à la montrer sous un autre jour, ou si peut-être, l’art cherche à agrandir notre