Analyse sur l'histoire de l'afrique
ANTHROPOLOGIE POLITIQUE ET HISTOIRE DE L'AFRIQUE NOIRE
LES relations entre anthropologie et histoire sont actuellement l'objet de controverse. Les anthropologues ne sont pas toujours tendres envers leurs collègues historiens : ceux-ci souffrent plus qu'ils ne bénéficient de leur antériorité, car certaines habitudes acquises alourdissent un appareil scientifique naguère mal préparé à affronter la découverte récente de « sociétés traditionnelles » tout aussi respectables mais fondamentalement différentes de celles du monde industriel. En Afrique noire plus qu'ailleurs, le métier d'historien demeure difficile à exercer ; la carence des sources écrites, presque toutes d'origine étrangère, a longtemps permis d'en mettre en doute la légitimité ; l'argument a fait son temps, mais l'historien n'a pas toujours acquis droit de cité.
Après avoir nié l'histoire de l'Afrique, on a récusé son incurable européocentrisme. Il n'est pas inutile de rappeler que, dans les deux cas, les détracteurs de l'histoire et parfois les historiens eux-mêmes, ébranlés par un tel consensus, ont été victimes d'une double ambiguïté, héritée d'une double déficience de vocabulaire : les mots d'histoire et d'européo- centrisme recouvrent chacun deux concepts différents que l'on a parfois confondus à plaisir : l'histoire vécue telle qu'elle se déroula au jour le jour, au gré de l'événement, n'est pas l'histoire écrite, c'est-à-dire restructurée par des esprits méthodiques désireux d'en projeter le sens dans le passé x. Les Africains n'ont pas toujours eu conscience de leur histoire ; mais ils n'ont pas cessé de la vivre. Si l'on admet aujourd'hui la possibilité d'élaborer leur histoire, on se passerait volontiers, pour ce faire, de l'historien. Celui-ci serait condamné à un européocentrisme à deux degrés : en premiér lieu il a pris, de longue date, l'habitude de privilégier les activités de l'Europe en Afrique aux dépens de l'évolution interne des peuples ; même s'il se défait de ce