Analyse poétique
(Banville)
- Étude des concordances/discordances & transpositions -
Banville L'EXIL DES DIEUX
1
C'est dans un bois sinistr(e) // et formidabl(e), au nord De la Gaule. Roidis // par un suprêm(e) effort, Les chênes monstrueux // supportent avec rag(e) Les grands nuages noirs // d'où va tomber l'orag(e);
5
Le matin frissonnant // s'éveill(e), et la clarté De l'aube mord déjà // le ciel ensanglanté. Tout est lugubr(e) et pâl(e), // et les feuilles froissées Gémissent, et, géants // que de tristes pensées Tourmentent, les rochers // jusqu'à l'horizon noir
10
Se lèvent, méditant // dans leur long désespoir; Et, blanche dans le jour // douteux et dans la brum(e), La cascade sanglot(e) // en sa prison d'écum(e). […]
CONCORDANCE & TRANSPOSITIONS Dès le premier vers, Banville joue de la syntaxe et du mètre pour créer un rythme et mettre en valeur certains termes où idées. Ainsi, on note le rejet interne de « et formidable », lié syntaxiquement à l'adjectif « sinistre », définissant le nom « bois »; on peut parler de discordance entre mètre et syntaxe puisque la césure se fait dans un même syntagme, à savoir ici le syntagme adjectival « sinistre et formidable ». C'est dans un bois sinistr(e) // et formidabl(e), au nord Cette première discordance se trouve d'autant plus soutenue par un contre-rejet externe : C'est dans un bois sinistr(e) // et formidabl(e), au nord De la Gaule. Roidis // par un suprêm(e) effort, Le « nord » est ainsi mis en avant, accentué par la coupure syntaxique effectuée par rapport au 2
syntagme adjectival précédent, même si ce contre-rejet ne présente tout de même pas de coupe lyrique, le syntagme « De la Gaule » pouvant être élidé (groupe prépositionnel). Le vers 2 quant à lui présente une coupe lyrique; ainsi, on assiste à un effet de discordance mètre/syntaxe marquée par un contre-rejet interne. En effet, le verbe « roidir » ici conjugué dans sa forme transitive et non pronominale, ne peut fonctionner