Amour chez proust
Pour Marcel Proust, l'amour est une création de nous-même, une projection sur un autre être d'une imagination, d'un désir. La personne aimée n'est pas, ne peut pas être la personne réelle, elle est constituée presque complètement par des « éléments tirés de nous-même ». Et pourtant, malgré ce leurre, malgré le cortège de douleurs et de larmes que l'amour traîne après lui, il est la seule part de bonheur dans la vie qu'il y ait sans doute. Proust rejoint Stendhal et la cristallisation : le choix est involontaire, l'imagination jouant sur la souffrance, épiloguant à satiété sur les plus minimes apparences, finit par obtenir une fixation. L'être aimé nous paraît unique en soi, et pour nous, prédestiné et nécessaire. En fait, pour Proust, et pour les héros de Proust, l'amour n'existe qu'en fonction de la jalousie. C'est pourquoi les femmes aimées sont invariablement des êtres de fuite, qui rendent impossible toute stabilité, toute certitude. Ainsi naissent, grandissent, s'exaspèrent les sentiments obligatoires grâce auxquels on parvient à éprouver l'amour : angoisse, exaltation, désir torturant de la présence, acharnement à savoir : L'amour est entretenu par l'anxiété douloureuse. Toute satisfaction qu'on lui donne ne fait généralement que déplacer la