04 Kral Engagement
Petr KRAL
A mesure que Kundera rencontre un succès grandissant après son départ de l’exTchécoslovaquie, les attaques contre lui se multiplient. Il s’agit en premier lieu de critiques venant de la part de ses compatriotes, ou plutôt ex-compatriotes. Ce dont on l’accuse est un nonengagement : on lui reproche moins ce dont il parle, que ce dont il ne parle pas ou ce dont, d’après ses critiques, il évite de parler. C’est ainsi qu’un écrivain très engagé dans les activités dissidentes, notamment celle des chartistes, réagit à une interview donnée par Kundera au NewYorker et rédige une critique à l’égard de celui-ci dont l’essentiel consiste en deux points : il l’accuse d’une part de frivolité, et d’autre part - et avant tout - de ne pas parler des dissidents euxmêmes ; selon ce critique, Kundera ne s’exprime, en effet, qu’en son nom. Lorsqu’il est interviewé sur la culture ou la littérature tchèques, il ne prend aucune position politique manifeste pour défendre, voire propager, la cause de ceux qui sont restés au pays et qui développent une culture parallèle ou clandestine.
Les critiques de ce type ne sont pas issues uniquement de l’intérieur du pays, le rédacteur en chef de la plus importante des revues d’émigration qui siège à Paris commence par faire la cour à Milan Kundera ; il le publie, lui demande une nouvelle ou un chapitre inédit qu’il fait paraître dans sa revue, jusqu’au moment où advient une rupture. Il s’agit du jour où le journaliste en question lui demande d’accepter publiquement un prix décerné à Vaclav Havel à la place de celui-ci, car ce dernier est en prison, et où Kundera refuse cette demande. A partir de cet instant, le rédacteur en chef cherche à se venger en usant de toutes sortes de stratagèmes : en faisant, par exemple, de nombreuses allusions perfides à l’écrivain ou en retrouvant un ancien texte de
Kundera datant de 1969 et reflétant, justement, une polémique entre lui et Vaclav Havel au sujet
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