Condorcet et le droit des femmes: «sur l'admission des femmes au droit de cité»
Dans cet exposé nous allons voir en quoi De l’admission des femmes au droit de cité de Condorcet rompt d’avec les idées des Lumières et les principes de la Révolution française en ce qui concerne le rôle que doivent jouer les femmes dans la société. Dans un premier temps il sera question de faire un tour du paysage dans lequel écrit Condorcet et d’en faire ressortir les idées dominantes, puis, dans un deuxième temps, nous verrons en quoi la pensée de Condorcet sur la femme, à travers l’étude du texte De l’admission des femmes au droit de cité, est en discontinuité d’avec les idées de son siècle.
I. Conception de la femme au temps de Condorcet : les Lumières et la Révolution française
Cette première partie aura comme objectif principal de situer le texte de Condorcet dans son contexte historique, politique et philosophique. Cette vue d’ensemble du paysage dans lequel Condorcet écrivit De l’admission des femmes au droit de cité nous permettra, notamment avec la deuxième partie, de comprendre en quoi cet auteur rompt d’avec la tradition des idées propre aux Lumières et à la Révolution française en ce qui concerne la conception de la femme et plus précisément le rôle qu’elle doit occuper dans la société.
A. Les Lumières et le développement d’un individualisme «exclusif» : la femme marginalisée
Pour Kant, les Lumières sont «cet accès au savoir et cet exercice public de la liberté de pensée grâce auxquels l’humanité s’affranchit de toute tutelle et accède à la majorité» (Fauré, 2010 : 168). Or, on constate que cet idéal ne s’appliquera pas au destin de tous : en effet, les femmes, au siècle des Lumières, resteront mineures et n’accèderont donc pas à l’individualisme juridique affirmé par le droit naturel moderne et mis en application, en partie (les hommes) au sein de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Au contraire, on trouve dans la pensée des Lumières des justifications quant à la privation, pour la femme, de ses droits